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8 décembre 2012 6 08 /12 /décembre /2012 09:04

J'ai déja parlé des crapauds et autres grillons, je peux maintenant évoquer un colocataire plus prestigieux. Il y a un caméléon dans mon jardin.  

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Au début, je croyais que c'était juste un lézard stupide, ridiculement haut sur pattes, un peu plus vert que les autres, les margouillats, qui pullulent, sont gris pour les femelles et arborent de belles couleurs bleu et orange sur la tête et, sur le bout de la queue, pour les mâles.

  SS100095

 

Mais en m'approchant, je me suis rendu compte que monsieur était en train de se gonfler et que sa gorge devenait bleue. Ce qui n'a pas manqué d'éveiller ma curiosité zoologique et je me suis dépêché d'aller chercher mon apparail photo qui, par chance, fonctionnait.  

 

SS100099

 

 Franchement, je crois que je n'avais jamais vu de caméléon en liberté, et c'est vraiment impressionnant. L'animal change de couleur et même de volume à vue, et il est assez gros pour que ce soit bien visible, spectaculaire et assez impressionnant. Quand il drague, il se choisit des couleurs claires et vives, plus seyantes. Là, mon caméléon est en train de devenir noir de colère.     

  SS100103

 

Le gars a même essayé de m'impressionner en ouvrant la gueule et en se mettant à cracher comme un chat. Moi, j'ai eu presque pas peur. Le caméléon est un animal méchant et dangereux, le saviez-vous? Bizarrement, les Africains ont peur des geckos, ces tout petits lèzards blancs un peu roses qui se collent dans les angles des plafonds à l'intérieur des maisons, ils les appellent même "lézards du diable", en arabe, mais je n'ai jamais rencontré personne qui m'avoue avoir peur des caméléons, alors que le caméléon fait très très peur quand il se met en colère et qu'on le regarde de près.

 

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Et hop, on redevient bleu. Regardez-moi ce sourire hypocrite.

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28 novembre 2012 3 28 /11 /novembre /2012 09:25

J'étais tranquille devant mon ordinateur, aprés le travail, il était dans les dix-huit heures. Un collègue finissait lui aussi sa journée sur l'ordinateur à côté de moi. L'un d'entre nous, je ne sais plus lequel, évoqua la possibilité d'aller boire une petite bière vite fait, avant de rentrer à la maison (nous habitons dans une vaste concession de petites villas mitoyennes.) Dehors, la nuit était tombée sur la rue déserte, percée par quelques lampadaires diffusant une lumière orange ici et là, assez irrégulièrement, et laissant de larges parties de la rue dans le noir le plus complet. Quelques jeunes "zoulous", comme on appelle les voyous dans le quartier, traînaient autour d'une mobylette sous un lampadaire.

 

Nous montâmes dans mon pick-up et parcourûmes à peine une centaine de mètres avant de nous arrêter devant l'entrée d'un hôtel, le Shangri-la, situé à côté de notre lieu de travail, mais qui semble appartenir à un autre monde, avec lequel mes collègues et moi-même n'avons absolument aucun lien. Le Shangri-la est une villa d'un étage, perpendiculaire à la rue, d'assez médiocre apparence, qui domine une petite cour bétonnée. Je ne pense pas avoir jamais envisagé sérieusement d'y entrer. Mais l'occasion faisant le larron, nous décidâmes d'aller voir s'il y aurait moyen d'y boire un coup et montâmes l'escalier qui mène à la porte d'entrée, au premier. Un vestibule vide et obscur menait à une salle de restaurant, qu'un Tchadien que nous dérangions un peu dans sa sieste perpétuelle vint allumer pour nous. Il nous servit nos bières, avant de disparaître et de laisser la place à une jeune femme chinoise dont on pouvait se demander si elle était en train de s'habiller ou de se déshabiller. Toujours est-il qu'elle prit place derrière le bar et fit mine d'y faire un peu de comptabilité. La salle était un peu défraîchie, quelques tables couvertes de nappes pas très propres, des fleurs en plastique, une guirlande électrique clignotante, des taches sur les murs et une odeur vaguement désagréable. 

 

J'ai connu naguère une sorte de passion intellectuelle pour la Chine ancienne, dont je considère que la culture littéraire, picturale, achitecturale - et plus généralement l'art de vivre chinois traditionnel tel qu'il se laisse deviner dans les certains textes anciens de Cao Xueqin, l'auteur immortel du Rêve dans le pavillon rouge, ou de Liu Zhongyuan, et de tous les autres, les grands écrivains des Tang, des Qin, des Han, des Royaumes combattants, sans parler de Zhuangzi, mon maître- est une des plus grandes réussites de l'humanité. Bière aidant, je discourus ainsi longtemps sur les vertus de la sensibilité chinoise, sur celles du thé du Dragon vert, sur mon désir de voir Shanghaï ou Nankin avant de mourir, sur l'émotion qui me serre la gorge chaque fois que je me remémore quelques vers de - comment s'appelle-t-il, déja?- Li Bai.

 

J'essayais ainsi de convaincre mon camarade, un Français d'origine algérienne, plus réticent que moi, qui soulignait, comme le font d'ailleurs souvent les Français, peut-être un peu jaloux de la pénétration chinoise en Afrique, l'aspect intéressé et peu regardant de la coopération sino-africaine, qui pille les matières premières de l'Afrique en échange d'infrastructures construites au rabais, la mauvaise qualité des routes que construisent les entreprises chinoises -certes, leur bitume se fend, mais eux, au moins, construisent, et on ne peut pas en dire autant de la France qui, en soixante ans de colonisation, n'a pas investi grand'chose en Afrique centrale. De notre étage, nous regardions, par une porte-fenêtre, la nuit sur les toits de N'Djaména, quelques arbres un peu rabougris, les lumières oranges de la rue voisine, la tôle des toitures qui couvrent quelques cases disposées dans les cours des villas cossues de Clémat, et dans le ciel noir violacé, les feux rouges signalant le sommet des antennes de téléphonie mobile.

 

Nous décidâmes de payer et d'aller visiter un second établissement chinois, non loin de là, à l'angle de la rue voisine, un "salon de thé" dont le nom, en lettres lumineuses bien visibles de la rue, est formé d'une série de chiffres, peut-être "128 Salon de Thé", ou quelque chose d'approchant. A l'intérieur, un bar, beaucoup plus accueillant que le premier, peut-être le bar le plus cosy que j'aie jamais vu à N'Djaména : des meubles neufs, un éclairage agréable ; pas de fleurs en plastique ni de guirlande clignotante, du bois verni sobre et des cuivres polis. Assis ou debout, babillant et minaudant, se tenait un festival, que dis-je, une farandole de jeunes Chinoises, toutes plus mignonnes les unes que les autres, se limant les ongles, fumant, tapotant leurs écrans tactiles, pinaillant dans la langue de Confucius, pliant et dépliant leurs longues jambes nues et blanches chaussées de talons aiguille.

 

Nous bûmes nos bières en essayant de ne pas regarder trop fixement ces jeunes personnes. Mon camarade évoquait le Sud Pacifique où il avait longtemps vécu, la vie bizarre des îles, les escales des vols, l'agitation intense des grandes villes : Vanuatu, la nouvelle Calédonie, les Philippines, Bangkok, l'Asie ensorceleuse. Ce qui est extraordinaire au Tchad, c'est qu'on y rencontre sans cesse dans la communauté française et bien sûr chez les Tchadiens des tas de gens interessants, cosmopolites, pleins d'expérience et qui sont capables de porter un regard ouvert, bienveillant et en même temps lucide sur ce qui les entoure ; je n'en dirais pas autant de certains autres pays d'Afrique centrale que je connais bien. Une femme qui devait être la patronne nous offrit un massage des pieds, mais nous déclinâmes l'invitation.

 

Il devait être vingt heures. Sur le chemin du retour, nous prîmes la route qui longe l'ancienne gendarmerie, laquelle n'est plus aujourd'hui qu'un immense terrain absolument nu, s'étendant du rond-point des Boeufs au rond-point Sonasut, très éclairé de hauts projecteurs, au milieu duquel un écran lumineux affiche entre autres une publicité rouge et bleue pour un hôtel de luxe chinois. Il y a là, au bord de cet espace vide, un autre lieu tenu par des Chinois : il s'appelle "La Fée", c'est un bar assez décrepit qui offre des services de massage et sans doute plus si affinités. Quelques clients arabes, en djellabah et turban y causaient autour de bouteilles de sucreries, tandiqu'à une autre table, un groupe de Russes ou d'Ukrainiens, aux cheveux blonds rasés et aux gros bras, peut-être des pilotes mercenaires, parlant et riant fort, buvaient de nombeuses bières et du whisky. De temps à autre, l'un d'entre eux s'éloignait avec une fille chinoise pas très belle dans une pièce voisine.

 

Il y avait au fond, dans tous ces lieux, une sorte d'uniformité un peu ennuyeuse, qui tranchait avec ce que j'avais cru remarquer concernant la présence chinoise à Libreville. Au Gabon ou au Cameroun, on croise aussi bien comme Chinois des cadres que, dans les rues des quartiers populaires, des hommes ou des femmes isolés, tenant des boutiques de petit commerce - vendant des bassines en plastique, des fleurs artificielles, des trucs et autres machins, ou même, dans la rue, ces beignets dont raffolent les Camerounais ; tandisqu'au Tchad, la population chinoise, quoique très nombreuse -il suffit de faire un vol Addis-N'Djaména pour s'en convaincre, les avions d'Ethiopian Airlines étant à moitié remplis de Chinois - semble beaucoup plus homogène : des cadres et des techniciens supérieurs travaillant pour de grandes entreprises chinoises - et semble-t-il donc aussi, quelques filles pour tenir les bars dans lesquels ces messieurs vont se détendre.  

 

Je pense que, sur place, à N'Djaména, j'aurais eu plus de facilité à rencontrer et à parler un peu avec ces Chinois d'Afrique, pour essayer de voir comment ils vivent, ce qu'ils pensent des Africains, ce qu'ils en ramènent en eux - mais en même temps, cette communauté chinoise du Tchad, homogène et finalement pas tellement différente de n'importe quelle autre communauté étrangère, un peu repliée sur elle-même comme peuvent l'être par exemple les Français, me paraît beaucoup moins intéressante que celle, plus variée et surtout plus intégrée -ou perdue- dans la population noire, des Chinois du Gabon ou du Cameroun (sur ce point, http://equateurnoir.over-blog.com/article-presence-chinoise-dans-l-espace-postcolonial-francophone-45315957-comments.html#comment93143049

 

Le samedi et le dimanche, à la piscine du Novotel, des Chinois en maillot de bain envahissent le bassin, barbotent ou nagent en travers, gênant les autres usagers qui veulent faire des longueurs, criant et riant comme des enfants. Les Français qui viennent ici pour nager les regardent de leurs chaises longues, attendant leur départ, se demandant s'ils sont vraiment comme ça ou si c'est juste une sorte de parade dûe à la gêne qu'ils ont d'être dans un milieu complètement étranger et légèrement hostile. Et j'imagine que, tout en criaillant et en barbotant, les Chinois eux aussi observent et jaugent ces Français hautains qui dissimulent leur regard derrière leurs lunettes noires.

 

Quant aux Tchadiens, ils ne vont pas souvent à la piscine.

 

 

 

 

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21 novembre 2012 3 21 /11 /novembre /2012 11:53

La ville de Goma, au Nord-Kivu, en RDC, est tombée hier 20 novembre, entre les mains du M23, un mouvement de rebelles plus ou moins lié au Rwanda. L'armée congolaise s'est repliée en désordre, alors qu'hier encore, le gouverneur du Kivu se déclarait sur RFI absolument confiant et niait toute menace des rebelles sur Goma.

 

Rebelles du M23 près de Goma. Photo de Phil More pour Paris Match

http://www.parismatch.com/L-instant/Jour-apres-jour/La-chute-de-Goma-par-Phil-Moore/Republique-Democratique-du-Congo-Goma-19-Nov.-2012-447120/

 

En ce moment, je travaille avec un membre de l'Ambassade de République démocratique du Congo sur un projet visant à "valoriser la francophonie" au Tchad chez les jeunes. Il se trouve en effet que la RDC présidente en exercice de l'organisation internationale de la francophonie. C'est elle qui a ainsi organisé le dernier Sommet de la Francophonie à Kinshasa.

 

Chacun sait que lors de ce sommet, Hollande, après avoir longtemps hésité à s'y rendre, n'a pas épargné à Kabila les déclarations fracassantes sur l'aspect "inacceptable" du respect des droits de l'homme en RDC, ainsi que sur la corruption et autres lieux communs. Il y a peut-être une sorte d'acharnement et de "deux poids-deux mesures" dans cette sévérité de Hollande, qui n'a pas du tout fustigé ni l'Arabie saoudite, ni le Laos dans lesquels il s'est pourtant rendu peu après et qui ne sont pourtant ni l'un ni l'autre des modèles de démocratie et de droits de l'homme. Mais peut-être est-ce que la France se sent plus concernée par les souffrances des Africains, parce qu'elle s'en sent aussi plus responsable.

 

Après quelques années passées en Afrique, je dois dire que je suis devenu absolument allergique à tout ce qui ressemble, de près ou de loin, à de la corruption. C'est sans doute assez "facile", comme on dit, quand on est fonctionnaire bien payé d'un Etat stable, de critiquer la corruption dans le Tiers-monde ; mais il faut dire que, comme le veut un proverbe africain, "le poisson pourrit par la tête" : ce sont les "élites" politiques des Etats africains qui sont responsables de la corruption qui y règne, et ces élites ne sont guère plus à plaindre, matériellement parlant, qu'un fonctionnaire blanc.

 

On vient donc d'apprendre la chute de Goma, dans le Nord Kivu, en RDC. Les rebelles du M23, emmenés par Bosco Ntaganda, ex-lieutenant de Laurent Nkunda, dont les liens avec le Rwanda semblent avérés, ont pris la ville hier malgré la présence de plusieurs milliers de soldats de la MONUSCO à Goma. L'armée congolaise s'est "repliée" après avoir quelque peu violenté la population de Goma. D'après le porte-parole du gouvernement congolais, Lambert Mendé, c'est un peu le Rwanda qui envahit le Congo. Evidemment, la communauté internationale devrait intervenir, etc. Que font donc les Forces armées de la Rébublique très très démocratique du Congo ? Mystère. 

 

République Démocratique du Congo, Goma, 18 Nov. 2012

Casques bleus uruguayens de la  MONUSCO à Goma.

http://www.parismatch.com/L-instant/Jour-apres-jour/La-chute-de-Goma-par-Phil-Moore/Republique-Democratique-du-Congo-Goma-19-Nov.-2012-447120/

 

Il est également de notoriété publique que les soldats congolais, depuis des années, sont payés au lance-pierre, lorsqu'ils le sont, et que les officiers supérieurs de Kinshasa détournent allègrement la solde de leurs hommes. D'un autre côté, Kagamé, le président du Rwanda, a réussi, depuis le génocide rwandais, en 94, à éradiquer complètement la corruption dans son pays. Dans ces conditions le M23, qu'il soit soutenu ou non par le Rwanda, revendique la sécession du Kivu qui deviendrait ainsi une province sous influence rwandaise. On peut se demander si c'est vraiment ce qui pourrait lui arriver de pire.    

 

Comme à l'époque de Kolwezi, lorsqu'elle était intervenue pour soutenir le régime de Mobutu contre les rebelles katangais soutenus par l'Angola, la France vient de demander à l'ONU de nouvelles sanctions contre les chefs du M23 et soutient fortement le régime Kabila. C'est assez surprenant, après l'avoir humilié publiquement lors du sommet de la Francophonie, de se mettre ainsi en première ligne. Il y a un vieux réflexe français sur tout ce qui touche l'"intangibilité" des frontières africaines issues de la colonisation, mais finalement, on assiste, depuis plusieurs années, à une remise en cause de ces frontières arbitraires et dont les conséquences ont souvent été dramatiques, que ce soit au Soudan, au Mali ou au Congo. C'est peut-être le sens de l'Histoire ; un sens que ce jeune soldat, en tout cas, ne verra pas.   

 

 République Démocratique du Congo, Goma, 18 Nov. 2012

http://www.parismatch.com/L-instant/Jour-apres-jour/La-chute-de-Goma-par-Phil-Moore/Republique-Democratique-du-Congo-Goma-19-Nov.-2012-447120/

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20 novembre 2012 2 20 /11 /novembre /2012 16:22

http://www.flickr.com/photos/focus35/3783049132/sizes/m/in/photostream/

 

Quelques photos de Tchadiens prises par Monsieur Focus35 et publiées sur internet sous licence "creative commons". 

( je cite : "Vous êtes libre de partager — reproduire, distribuer et communiquer l'œuvre selon les conditions suivantes :

AttributionVous devez attribuer l'oeuvre de la manière indiquée par l'auteur de l'oeuvre ou le titulaire des droits (mais pas d'une manière qui suggérerait qu'ils vous approuvent, vous ou votre utilisation de l'oeuvre). 

Pas d’Utilisation Commerciale — Vous n'avez pas le droit d'utiliser cette oeuvre à des fins commerciales. 

Pas d'œuvres dérivées —Vous n’avez pas le droit de modifier, de transformer ou d’adapter cette œuvre.  "  

http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/2.0/deed.fr )

 

Donc, voici un superbe nomade pris non loin de Ndjaména, sous le Hadjer El Hamis.

Je précise que l'auteur de ces photos ne m'approuve pas, ni moi, ni la remarque suivante : on ne voit pas très bien les yeux, mais regardez donc le regard des suivants : 

 

 

...ces jeunes filles, probablement Gorane, lors d'un mariage. Ce sont quand même de magnifiques photos, même si ça a un petit côté calendrier UNICEF. 

 

 

Ces petits garçons, au bord du Chari, dans la lumière caractéristique du Tchad. 

 

 

 

http://www.flickr.com/photos/focus35/with/3783054622/#photo_3783054622

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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12 novembre 2012 1 12 /11 /novembre /2012 07:40

Un photographe que je respecte beaucoup, Stéphane Lehr, m'a engueulé la semaine dernière dans un commentaire sur ce blog parce que j'avais utilisé une photo de lui pour illustrer un article ( Mister Kalach ). Il m'a fait remarquer que les droits d'exploitation ne sont pas gratuits et m'a demandé de l'enlever. Dont acte.

 

J'ai beaucoup de respect pour Stéphane Lehr, que je ne connais pas du tout personnellement, mais un photographe qui va dans la brousse en Centrafrique ou en Ouganda, dans des conditions que l'on imagine bien sûr très difficiles, pour y rencontrer les tueurs fous de la LRA et qui réussit à en ramener des clichés aussi expressifs que techniquement parfaits de ces tueurs est un exploit qui mérite un respect inconditionnel.

 

La question que je me pose, c'est celle des "droits". Je ne connais absolument pas la loi tchadienne sur cette question, ni d'ailleurs la loi française ou n'importe quelle loi. Je sais qu'il y a des interdictions qui pèsent sur le téléchargement illégal de films, mais qu'en est-il du "copier-coller" de photos récupérées sur internet ?

 

Pour moi, il s'agit d'un cas particulier de ce que l'on appelle généralement le "droit de citation". N'importe qui a le droit de recopier un extrait d'un texte ou d'une oeuvre et de le citer dès lors que le support a été publié par son auteur, me semble-t-il. Je comprends cependant bien qu'un photographe gagne sa vie en touchant des droits sur les photos qu'il réalise. Mais je suppose qu'un photographe qui met des photos sur internet doit savoir qu'elles entrent de fait, qu'il le veuille ou non et quelles que soient les précautions qu'il prend, dans une sorte de "domaine public", c'est-à-dire qu'elles peuvent être copiées par n'importe qui et collées n'importe où. De plus, la reproduction de ses photos, dès lors qu'elles sont accompagnées de son nom, lui fait une publicité gratuite qui n'aurait jamais été aussi étendue avec n'importe quel autre média, c'est d'ailleurs sans doute la raison pour laquelle il les y a mises. Il me semble donc qu'il y a un peu d'hypocrisie à refuser la reproduction libre de photos dès lors qu'on les a postées soi-même sur internet et que l'on en tire un bénéfice en termes de publicité. Il suffit que le nom du photographe soit attaché, par un moyen technique quelconque, à la photo elle-même, ce qui d'ailleurs était bien le cas de Stéphane Lehr puisque son nom apparaissait incrusté, barrant la photo elle-même. (voir la photo : http://stephanelehr-photos.fr/reportages-page2.php)

 

Moralité : si tu ne veux pas qu'on te "vole" ce que tu considères comme ta propriété, ne le mets pas sur internet. Si tu le fais, tu te dépossèdes de tout "doit" sur tes oeuvres. Il faudrait peut-être que les auteurs comprennent que, jusqu'à nouvel ordre, ils n'ont aucun droit sur internet, dès lors que celui qui copie des photos réside dans un Etat qui ne prévoit pas ce genre de vol. Plus généralement, c'est la notion même de "propriété intellectuelle" qui pose un problème. Je suis (peut-être, mais rien n'est moins sûr) propriétaire des produits de mon intellect, mais si je veux en garder la propriété, il faut que je les garde pour moi-même dans mon fors intérieur. Si je commence à utiliser mes belles idées pour briller en société, il est inévitable qu'elles tombent immèdiatement dans la "propriété intellectuelle" de celui qui s'en saisit, le premier venu de mes auditeurs.  

 

Il y a d'ailleurs quelque chose d'assez beau dans cette espéce de dépossession intellectuelle qu'entraîne toute mise en commun dans le domaine intellectuel, et inversement quelque chose d'assez laid, du point de vue moral, à la refuser. Nous savons tous bien que nos idées elles-mêmes, l'inspiration qui a présidé à un cadrage, par exemple, ou la lumière, et encore moins l'expression que revêtait à cet instant précis le visage photographié de ce soldat halluciné par les meurtres qu'il avait commis, n'appartiennent à personne, sinon au diable, à Dieu ou aux muses. Il est donc un peu ridicule, et je dirais même déplaisant, dans le fond, mais je veux bien que l'on me contredise, de s'approprier l'image de ce visage qui porte bien, sur lui-même, la "propriété morale" de ses crimes, qui les paie sans doute assez cher, et de barrer le visage de ce soldat qui a bien, lui aussi, un nom - du nom de l'auteur de la photo, comme si le seul fait d'être pris en photo le transformait en une propriété du photographe. Après tout, l'image de ce visage n'appartient qu'à celui qui le porte. Il est donc un peu faux et immoral de s'approprier l'image de meurtriers stupéfiants, tant qu'on n'a pas soi-même commis ces meurtres, tant qu'on n'est pas soi-même l'artiste qui a sculpté ces visages. Dans ce cas, comme dans bien d'autres sans doute, la propriété, c'est le vol. Il faut rendre à Joseph Kony (le tristement célèbre leader de la LRA) ce qui appartient à Joseph Kony. 

 

Mais je comprends bien que toutes ces questions sont plus compliquées que ce que j'imagine. J'ai donc retiré la photo incriminée "de" Stéphane Lehr et la prochaine fois, pour preuve de ma bonne volonté, je reproduirai des photos publiées sous licence "creative commons". Si j'ai bien compris, il s'agit de photos qu'on a le droit de reproduire, tant que l'on ne s'en attribue pas la paternité et qu'on cite le nom de leur auteur.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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8 novembre 2012 4 08 /11 /novembre /2012 09:17

 

Les résultats de la deuxième session du bac tchadien 2012 sont tombés hier. Bernard n'a pas été reçu. Sur 63 000 candidats, seuls 4,8% ont été admis. Commentaire d'un responsable du Bac sur Al Wihda :

 

""Cette deuxième chance donnée aux candidats nous à montrer à suffissance que le niveau des élèves est remis en question, c'est catastrophique. Nous avons tout fait mais le filtre a retenu une pincée de personnes", selon un responsable de l'ONECS [Office National des Examens et Concours du Supérieur] à Alwihda, joint par téléphone."

http://www.alwihdainfo.com/Tchad-Moins-de-5-d-admis-au-baccalaureat-2eme-session_a5838.html

 

"Nous à montrer à suffissance." Il n'y a pas que le niveau des élèves qui puisse être remis en question : trois grosses fautes d'orthographe dans la même phrase, c'est quand même beaucoup, surtout pour un responsable des examens et concours tchadiens. Ce même responsable qui condamne une soixantaine de milliers de jeunes Tchadiens à une existence plus ou moins bouchée et misérable sans espoir de changement (avec le Bac, on ne fait pas grand'chose, mais sans le Bac ...) à cause de leurs mauvais résultats, a lui-même un niveau de français visiblement faible. Comment quelqu'un qui est capable de faire trois grosses fautes d'orthographe en une seule phrase peut-il avoir un jugement sur le niveau des candidats au bac ? On (moi) a de plus en plus de mal à supporter cette espèce d'intransigeance à sens unique de "responsables" qui prétendent "avoir tout fait" mais imputent au niveau des élèves un échec qui est en réalité celui du système scolaire qui a produit ce niveau -  échec dont ils sont probablement les principaux responsables par leur propre incompétence.  

 

 

 

 

 

 

 

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5 novembre 2012 1 05 /11 /novembre /2012 17:28

Dans le roman déchirant de Blondin, Monsieur Jadis ou l'école du soir, Monsieur Jadis avait deux petites filles, qui venaient le voir de temps en temps à Saint Germain des Prés. Moi, j'ai deux garçons, et j'essaie d'aller les voir de temps en temps à Libreville, au Gabon, mais pour ça il faut prendre l'avion.

 

Jeudi dernier,  je me rendis ainsi, plein d'entrain, à l'aéroport Hassan Djamous de N'djaména dans le but de prendre place dans le vol que j'avais réservé pour Libreville via Douala. Il s'agissait d'un vol Asky, la compagnie panafricaine qui se flatte de "rendre nos voyages plus faciles". Il était huit heures, le ciel était bleu et les taxis jaunes (comme tous les jours); je m'apprêtais à passer vingt-quatre heures à Douala pour y attendre la correspondance vers Libreville, le jeu des correspondances êtant tellement bien éudié en Afrique centrale que je suis devenu coutumier du fait, mais finalement j'aime bien Douala où j'ai mes petites habitudes, mon petit hotel à Makepé, mes petits souvenirs.

 

A huit heures trente, à l'aéroport de N'Djaména, je remarquai une petite affiche indiquant que le vol avait été supprimé "pour des raisons d'exploitation". A l'agence Asky, on me déclara qu'on me rappellerait dans la matinée pour me proposer une solution. A force de rappeler, je finis par apprendre que le vol était reporté au dimanche soir.

 

Monsieur Jadis avait à Libreville deux petits garçons qui pleurèrent au téléphone lorsqu'ils comprirent que leur papa ne pourrait peut-être pas venir les voir. Il avait mal au ventre, il était rentré chez lui, il se sentait très mal et se tenait la tête entre les mains, assis sur son lit.

 

En fin de matinée, je suis allé à l'agence qui m'avait vendu le billet. Il restait, paraît-il, des places sur un vol de la Camair, la compagnie camerounaise, qui arriverait à Douala plus tard et me permettrait d'avoir ma correspondance. Je pris un billet, et me rendis à nouveau à l'aéroport. Au moment d'enregistrer mes bagages, j'appris que Camair avait continué à vendre des places alors que le vol était complet depuis longtemps. On dit souvent que les Camerounais ont le sens du business.  

 

Désespéré, je retournai à mon agence : il restait une dernière solution : la compagnie éthiopienne qui dessert toute l'Afrique à partir d'Addis Abeba. Je devais donc payer un billet à plus de mille euros pour traverser l'Afrique vers l'Est jusqu'à Addis puis la retraverser dans le sens inverse vers Libreville.

 

C'est ainsi que je pus rejoindre mes gosses et passer avec eux une semaine. Au retour, nouveau vol vers Addis. Sur place, je ne trouve plus d'affichage concernant la correspondance Addis-Ndjaména. Un employé me baragouine quelque chose à propos d'Abudja, au Nigeria. Je suis un troupeau de voyageurs à travers le hall à la suite d'une hotesse qui clame "Passengers to Ndjaména !"...  mais l'avion dans lequel elle nous emmène ne va pas au Tchad, mais bien à Abudja. Le trajet survole le Tchad, équidistant entre l'Ethiopie et le Nigeria ; mais c'est seulement du Nigeria que je repars pour le Tchad. Il paraît qu'il y avait trop de pélerins vers la Mecque, les compagnies mobilisant toute leur flotte durent annuler ou modifier de nombreux vols moins rentables.

 

Au total, pour effectuer un trajet de deux ou trois mille kilomètres entre deux pays de la même région, j'ai dû traverser l'Afrique sur toute sa largeur quatre fois en une semaine. Je peux vous dire que mon empreinte carbonne pèse lourd, et pourtant je n'avais pas beaucoup de bagages.

 

Les représentants officiels de la Communauté Economique et Monétaire des Etats d'Afrique Centrale parlent baucoup d'"intègration régionale", de "libre circulation des personnes" et j'ai même entendu un certain Monsieur Pierre Moussa affirmer sur Africa 24 qu'une compagnie aérienne "Air Cemac" était déja pour ainsi dire presque opérationnelle : ses capitaux sont déja rassemblés, le site est déja trouvé, un directeur a déja été pressenti ... quelque chose me dit que Monsieur Jadis n'a pas fini de suer d'angoisse chaque fois qu'il voudra voir ses petits garçons.

 

 

 

 

 

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23 octobre 2012 2 23 /10 /octobre /2012 08:50

Comme disait Sartre, "je suis seul et délaissé dans le monde, non au sens où je demeurerais abandonné et passif dans un univers hostile, comme la planche qui flotte sur l'eau, mais au contraire au sens où je me trouve soudain seul et sans aide, engagé dans un monde dont je porte l'entière responsabilité."

 

C'est justement ce qui vient de m'arriver ce matin, avant même que j'aie eu le temps de boire mon café, et Dieu sait si je me sens abandonné et délaissé comme un sac plastique dans une décharge municipale avant d'avoir bu mon café. 

 

Je venais de mettre ma deuxième chaussette, et, au moment d'introduire mon pied dans ma chaussure, mes orteils ont rencontré un contact bizarre au fond du tunnel obscur que forme un soulier en cuir : le contact d'une chose qui bouge.

 

Réprimant à grand-peine un cri d'horreur, j'ai retiré mon pied et secoué énergiquement la chaussure : deux espèces de grillons horribles, noirs et hérissés d'antennes et d'hélices en sont tombés. D'instinct, je les ai écrasés l'un sur l'autre sous la semelle de la chaussure avant de les balayer dehors. Et, soudain, je me suis ainsi trouvé engagé dans un monde inconnu et terrifiant, dans lequel je trouve et tue des bêtes repoussantes dans mes pompes, pourquoi pas dans mon lit et bientôt dans mon slip.

 

Je refuse d'assumer ma responsabilité dans l'existence d'un monde dans lequel l'horreur, la violence et le meurtre précèdent le petit déjeuner. Sartre pourra bien me traiter de salaud de mauvaise foi, rien à faire. L'existentialisme, un humanisme? Mon cul. 

 

Il y a en ce moment à N'djamena une invasion de bêtes toutes plus repoussantes les unes que les autres. Des dizaines de crapauds se réunissent sous mes fenêtres ; un soir, en rentrant, j'en ai trouvé trois ou quatre dans ma chambre. La nuit, j'ai rêvé que j'étais poursuivi par un énorme crapaud, gros comme un chien, paniqué et qui sautait partout autour de moi, si maladroit dans sa panique qu'il me heurtait avec son horrible peau visqueuse.

 

Le jour, pour me détendre, je vais nager à la piscine; ici encore, tout en travaillant mon crawl, lorsque j'ouvre la bouche pour respirer, j'avale des sauterelles noyées qui flottent à la surface. Au fond, sous l'eau, d'énormes scorpions d'eau se collent au carrelage de la piscine. Une baigneuse qm'a raconté que ces bêtes, quoique inoffensives, s'accrochent parfois à son maillot de bain et font ainsi sur elle quelques longueurs.

 

 Aristote prétendait que le spectacle de la nature est toujours beau. On voit bien qu'il a passé toute sa vie en Grèce.

 

 

 

 

 

 

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16 octobre 2012 2 16 /10 /octobre /2012 17:00

Il y a paraît-il, un milliard de personnes souffrant de carences alimentaires dans le monde. Moi, j'ai bien grossi un peu, mais c'est vrai que la question de savoir qu'est-ce qu'on mange reste toujours une question sensible au Tchad. Il n'y a pas beaucoup de restauration de rue, sauf de viande grillée, et personnellement, je n'ai pas toujours envie de manger du chameau braisé, sans autre accompagnement qu'un petit morceau d'oignon doux et un tas de piment en poudre au gingembre. Les Tchadiens ne mangent pas souvent dehors, ils mangent à la maison, et le menu invariable, c'est la boule.

 

 

http://www.ndjamena-matin.com/photo-1156341-Repas_tchadien_boule_jpg.html

 

La boule se prépare avec différentes sortes de farines que l'on fait cuire à la vapeur : il y a la boule de maïs, très goûteuse, la boule de riz, un peu étouffe-chrétien, la boule de sorgho, ma préférée ... Le sorgho est une céréale rouge qui fait comme des grappes de graines rondes au haut d'une tige qui ressemble à celle du maïs et peut facilement atteindre les deux mètres.

 

La boule se mange avec les doigts, dans les meilleures familles. On arrache un petit morceau de pâte et on le trempe dans le bol contenant la sauce. Sur la photo, vous reconnaissez deux sortes de sauces : à gauche, la sauce aux légumes, avec ce qui est probablement des épinards dans de la pâte d'arachides cuisinée avec des morceaux de viande de zébu. A droite, la sauce gombo, sauf erreur de ma part : le gombo est un truc qui pousse sur des plantes, et qui ressemble un peu à un piment ou à un poivron ; il donne à une préparation un liant nettement gluant, si bien que lorsqu'on retire son morceau de boule du bol de sauce, ça fait comme un filament collant qui peut s'étirer en direction de ma chemise.

 

On mange la boule en famille, vers seize heures, lorsque la chaleur commence à décroître, sous la véranda devant la maison, parfois à table, parfois assis par terre sur une natte de roseaux tressés comme sur la photo. J'ai été ainsi invité parfois dans des familles tchadiennes, dans des quartiers plus ou moins pittoresques. Les rayons du soleil répandent une belle lumière orangée sur le mur de briques ou sur la terre du torchis ; on est assis entre hommes, on parle peu, le geste de tremper les mêmes doigts dans les mêmes plats crée, bien entendu une sorte de convivialité rustique. On boit dans des timballes en inox l'eau fraîche tirée de la pompe qui se trouve au milieu de la cour ; un chien jaune à trois pattes, famélique et humble, vient tourner autour de la table.

 

Des enfants noirs viennent de temps en temps jeter un coup d'oeil timide et effronté sur le Blanc qui mange avec ses doigts, et ils se cachent à demi pour rire de plaisir.

 

Manger avec les doigts est-il un signe d'intègration? Quand un Blanc mange avec les doigts, on lui dit immanquablement qu'il est à moitié africain. Non, la vérité c'est que si on avait des fourchettes et des couteaux, on mangerait avec des fourchettes et des couteaux. Mais il faut remarquer aussi qu'il y a un certain plaisir à malaxer légèrement la boule pour un faire une boulette dans la sauce, ou alors à sucer la sauce sur les arêtes du poisson pincées entre deux doigts. Surtout, il ne faut jamais utiliser la main gauche : c'est celle qu'on utilise pour se torcher le cul, si je peux me permettre.

 

La boule a un aspect bizarre, un peu simpliste, comme du pain que l'on cuirait à l'eau parce qu'on n'aurait pas de four. Il se peut que cette tradition soit liée au nomadisme : le nomade va au plus simple. Je me demande si elle doit être considérée comme un plat un peu fruste qui peut être l'objet de recettes plus élaborées, ou si au contraire il ne faut pas y voir une recette parfaitement élaborée et adaptée à un milieu spécifique. Ce qui est certain, c'est qu'elle est en partie en concurrence avec le pain, avec la bonne vieille baguette francophile qui est un héritage colonial typique en Afrique centrale et qui peut également être mangé comme base d'un plat avec une sauce ou un poisson.    

 

 

 

 

 

 

 

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8 octobre 2012 1 08 /10 /octobre /2012 18:56

Je suis allé ce week-end faire un peu de tourisme à Nguéli.

 

Mon fils adoptif provisoire (voir l'article précédent) avait en effet reçu des appels de sa logeuse lui disant qu'on priait bien sûr pour sa réussite au baccalauréat, mais aussi que s'il ne se dépêchait pas, ses affaires allaient être englouties dans les inondations qui ravagent le quartier où il habite : Nguéli ; ce qui m'a donné un excellent prétexte pour aller visiter.

 

inondation 4

 

Le tourisme de masse, c'est bien gentil, mais quand on a une ambition un peu plus élevée, il faut essayer d'aller faire du tourisme là on est tout seul à en faire : sur le site d'une catastrophe naturelle, par exemple, justement comme ces inondations qu'on déplore en ce moment à N'Djaména dans les quartiers sudistes de Walya et de Nguéli.

 

inondation 1

 

J'ai donc pris mon pick-up pour aller déménager ses affaires et lui faire prendre quelques photos. En effet, le touriste compétent doit savoir que s'il prend ses photos lui-même sur le site d'un désastre humanitaire, il risque de se faire insulter. Mieux vaut donc le faire faire par quelqu'un d'autre. C'est ainsi Bernard qui a pris les photos et il n'a d'ailleurs, comme je l'avais prévu, pas manqué de se faire insulter. Les gens n'ont pas d'humour. 

 

inondation 2

 

Certains disent qu'on ne sait même pas d'où vient toute cette eau, à croire que c'est le Diable qui la fait sortir du sol. A ce stade d'acharnement dans lequel Dieu, le Diable, la nature et les hommes conspirent à torturer les Tchadiens, j'aurais tendance à dire qu'il n'y a plus qu'à se lamenter sur son sort ou faire des blagues sinistres pour faire passer la pilule ; mais les Tchadiens, qui sont plus courageux que moi, prennent une pelle et creusent pour endiguer la progression des eaux.

 

inondation 3

 

En tout cas, c'est très joli, toute cette eau.

 

Sur Africa 24, la chaîne de télé panafricaine, j'ai vu, je le jure, une annonce selon laquelle au Cameroun, dont le Nord est également inondé, sauf erreur d'Africa 24, le Président Paul Biya a débloqué une somme exceptionnelle pour aider les sinistrés : DIX MILLIONS DE FRANCS CFA (10 000 000). Dix millions. Ca paraît énorme, mais en fait ça vaut juste 15 000 euros ; soit à peu près le tiers de la valeur d'une des innombrables voitures que possède la Présidence. 

 

On peut dire que Biya a de l'humour, lui, alors. 

 

 

 

 

 

 

 

 

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